Interview dans La Libre de ce weekend.
Rabbine parmi les rabbins, Delphine Horvilleur a donné au mouvement juif libéral (aujourd’hui « Judaïsme en mouvement ») un nouvel essor. Si sa voix est très écoutée, ce n’est pas seulement parce qu’elle est claire et accessible, c’est aussi parce qu’elle est forte et lumineuse. Ses propos heurtent souvent les orthodoxes et les fondamentalistes. Son credo : l’ouverture et la tolérance, le respect et la bienveillance. L’amour, quoi. Mais un amour des autres qui se nourrirait de leurs différences.
Elle cultive le doute qui construit. Elle aime jeter des ponts, ouvrir les portes et les fenêtres, même en temps de confinement. Surtout en temps de confinement. Car la tendance actuelle est plutôt au repli sur soi. « Cette crise, dit-elle, renforce les monologues idéologiques : confinées chez elles, beaucoup de personnes ne font que consolider leurs certitudes. » D’où son doute sur la manière dont nous sortirons de ce confinement : grandis ou médiocres, courageux ou peureux ?
Elle aime brouiller les pistes, même si elle le fait sans souci aucun de la provocation. Dans un monde religieux qui ne laisse pas beaucoup de place aux femmes, elle a choisi d’accéder au rabbinat après avoir étudié les textes à New York là où le mouvement juif libéral permettait l’ordination de femmes.
À Paris, ses offices attirent la foule des juifs et des non-juifs, des anonymes et des people. Elle a officié aux enterrements de Simone Veil et de Sonia Rykiel. Elle a créé Tenou’a, un atelier de pensée juive. Chaque mardi, confinement oblige, elle donne un exercice en vidéoconférence qui attire plus de 70 000 personnes. Pourquoi ? Parce que Delphine Horvilleur crée du savoir, répand de l’empathie, donne de l’espoir et aide à comprendre le monde. Que demander de plus ?